Les interconnexions électriques européennes sont au mieux mal intégrées dans le raisonnement, au pire perçues comme le joker absolu.
Pourquoi un joker ?
Dans la plupart des scénarios sinon tous sur ce que sera le système électrique à 2035 ou 2050, que ce soit l’ADEME, Négawatt ou même RTE, on nous explique qu’en cas de déséquilibre entre la production et la consommation, les interconnexions permettent tantôt d’évacuer les surproductions, tantôt d’importer l’énergie nécessaire pour maintenir le bon équilibre du système électrique français.
En partant de ce principe, on peut admettre que les pays avec lesquels nous sommes interconnectés disposent forcément des capacités de production dont la France a besoin au moment où elle en a besoin… Nous y reviendrons.
On peut également admettre également que les « tuyaux », les câbles qui assurent ces interconnexions sont d’une section suffisante pour assurer le passage de l’énergie nécessaire pour assurer ce « pénible » équilibre à assurer en temps réel… Nous y reviendrons aussi.
Nous devons signaler ici que pour RTE, ils modélisent les besoins propres aux interconnexions et ils s’assurent que les volumes projetés dans les simulations sont réalistes. Mais réalistes aujourd’hui ne veut pas dire réel demain et RTE semble conscient de cette limite sans trop l’afficher comme « Alerte » sur ses scénarios.

Maintenant, pourquoi mal intégrées dans le raisonnement ?
Les interconnexions représentent une capacité de transit de l’électricité … à la frontière. Au-delà de ce que peut nous donner comme accès à l’énergie – dans le cas d’un déficit de moyens de production en France – nos pays voisins, l’interconnexion elle-même est limitante. Ainsi, l’interconnexion avec la Belgique est plafonnée techniquement à 3,6 GW. Encore que …
Elle est plafonnée à 3,6 GW dans le sens France vers Belgique mais à 1,8 GW dans l’autre sens! [Données 2016]. En effet, il faut que le réseau national, ici la France dispose de moyens – des lignes de RTE – pour accueillir cette puissance à l’endroit de l’interconnexion. Or, des congestions « structurelles » nationales peuvent limiter la puissance de l’interconnexion comme dans le cas présenté ici.
Ensuite, projetons-nous dans un moment particulier où, dans une Europe prise dans un anticyclone hivernal, avec une atmosphère chargée en « smog » donc peu propice à la production photovoltaïque, on sera à coup sûr en situation difficile sur l’équilibrage entre production et consommation en Europe. Et là, l’Allemagne par exemple dépourvue de ses moyens de production éoliens et photovoltaïques, fait appel à ses voisins sur la base de contrats commerciaux.
Ainsi, imagine-t-on la Pologne, la Suisse ou la France céder à l’Allemagne l’électricité qui fait défaut à nos voisins d’outre-Rhin au risque de se retrouver soi-même en black-out.
Nous avons posé cette question à une personne aux responsabilités importantes à la Commission Européenne sur ces questions précisément. La réponse a été qu’il n’y pas de risque que le contrat ne soit pas respecté car … c’est interdit de ne pas le respecter.
Donc, notre conclusion est que les interconnexions sont nécessaires, vitales, garantes d’un système électrique européen performant, résilient et compétitif. Mais il est nécessaire d’appréhender le rôle des interconnexions avec lucidité et avec une approche collective.
Sur ce dernier point, force est de constater qu’il y a du chemin à faire. Aujourd’hui, chacun compte sur l’autre et réciproquement mais sans trop se demander si cela peut fonctionner.
On a du travail à faire ensemble en Europe !

La dernière source qu’on a pu récupérer sur les puissances des interconnexions européennes – si vous avez quelques choses de plus récent, laissez nous un message. Merci